Les conférences pleinières (les résumés)

jeudi 28 février 2013
par  REY

1ère SESSION : Enjeux didactiques

9 h - 9 h 50 Temps de l’écriture, temps du scripteur et gestion des contraintes ?

Sylvie Plane, IUFM Paris-Sorbonne.

Mon intervention se propose de compléter les définitions de l’expertise rédactionnelle qui se fondent sur l’analyse des propriétés attendues dans les textes, en focalisant l’attention non sur les traits repérables dans les écrits mais sur la manière dont s’opère le travail langagier en jeu dans l’écriture. Plus exactement, il s’agit de mettre en évidence la complexité de la dynamique scripturale et la diversité des traitements possibles de cette complexité afin de fournir des repères pour un programme didactique.
La complexité de la dynamique scripturale tient au fait qu’il s’agit d’un ensemble de processus hétérogènes impliquant à la fois le scripteur et son texte, et qui s’inscrivent dans des temporalités ne coïncidant pas entre elles. En effet, en tant qu’activité cognitivo-langagière, l’écriture est un ensemble d’actes et de microdécisions qui requièrent la gestion de contraintes antagonistes dont certaines, d’ordre psycholinguistique, sont étroitement dépendantes sur le plan temporel des capacités mnésiques du scripteur. En revanche, en tant que production de texte, l’écriture est un processus dont le terme n’est jamais fixé et qui se manifeste par la transformation continue, rétroactive ou proactive, d’un énoncé dont chaque mutation, même locale, modifie l’équilibre global. Enfin, en tant qu’acte de création verbale, l’écriture est la réalisation d’un projet diffus qui prend forme au fur et à mesure de son objectivation mais qui s’enracine dans les expériences langagières les plus lointaines du sujet scripteur.
Le fait que l’écriture soit soumise à des contraintes non hiérarchisables et qu’elle se déroule dans des strates temporelles de différentes granularités explique qu’elle sollicite des stratégies très diverses et que, par conséquent, les formes d’expertise rédactionnelle soient elles aussi très diverses. Pour le didacticien, il s’agira donc de repérer les stratégies spontanément privilégiées par les apprenants pour amener ces derniers à enrichir leur répertoire et à exploiter au mieux leurs potentialités.

2ième SESSION : Littéracie avancée, technologies et design d’information

13 h 30 - 14 h 20 Vers une formation « d’apprentis-linguistes » en littéracie avancée.

Fanny Rinck, IUFM de Grenoble et Laboratoire Lidilem, EA609, Université Grenoble Alpes.
Fanny.Rinck@ujf-grenoble.fr

Notre communication présente une démarche didactique en littéracie avancée basée sur le principe de former des « apprentis-linguistes ». La démarche concerne aussi bien les (futurs) professionnels de l’écrit, rédacteurs professionnels ou enseignants et formateurs que les (futurs) professionnels de domaines variés, où l’écrit joue un rôle important. Elle vise à favoriser le développement de compétences réflexives de l’ordre de l’analyse linguistique ; il s’agit de faire porter l’attention des apprenants sur la matérialité de l’écrit et sur les effets pragmatiques des textes.
Dans une première partie, nous interrogeons les référents de l’ordre de la rédactologie qui peuvent permettre de bâtir une formation à l’écrit en littéracie avancée. En regard de la notion de littéracie et de la société de la connaissance, l’ « expertise rédactionnelle » peut se définir à l’instar des multinationales qui se dotent de « bonnes pratiques » pour standardiser leurs documents et rationaliser leur communication. L’ « expert » pourrait être une machine, mais l’expertise est aussi une prise de décision face à une incertitude : comment anticiper les effets des textes et faire face à des situations toujours nouvelles ? Nous abordons les compétences littéraciques d’un point de vue linguistique et proposons de mettre à profit les apports de l’analyse des textes, des discours et de la linguistique de l’écrit ; alors que la rhétorique fournit des modèles de texte et la grammaire des règles du bon usage, ces domaines peuvent contribuer à une formation favorisant la réflexion métalinguistique des apprenants sur les genres et sur des caractéristiques textuelles et discursives transversales aux genres, dans une perspective d’aide à la compréhension et à la production. Comme le souligne M. Fayol à propos de l’importance de la révision au cours du processus de production : « la détection, le diagnostic et la décision d’intervenir (de réviser, reprendre) ne suffisent pas. L’auteur doit disposer de moyens tactiques pour intervenir » (1997 : 135) – et ne serait-ce, pourrait-on ajouter, que pour la « détection ». La description linguistique peut servir à développer une attention aux textes, à ce qui est un appui pour le lecteur et un lieu stratégique pour le scripteur. Les avancées de la linguistique de corpus permettent de nouvelles possibilités pour l’enseignement et l’apprentissage des langues et nous proposons une démarche basée sur le principe de la navigation textuelle comme outil didactique.
Dans une seconde partie, nous détaillons concrètement cette démarche fondée sur la description linguistique et visant le développement de ressources en didactique de l’écrit. Nous prenons deux exemples de scénarios didactiques et illustrons la navigation dans les textes avec le logiciel Navilire (Lundquist, Minel et Couto, 2006). Le premier scénario se base sur les descriptions des introductions d’articles de recherche en sciences humaines, la manière de faire un état des lieux et de « créer sa propre niche » (Swales, 1990). Le second est dédié non à un genre spécifique mais aux structures énumératives, omniprésentes dans les textes. Il permet aussi de discuter les évolutions des logiciels de navigation dans les textes comme outils didactiques et supports d’approches expérimentales.

Fayol M. (1997). Des idées au texte, psychologie cognitive de la production verbale, orale et écrite. Paris, PUF.
Lundquist L., Minel J. & Couto J. (2006). NaviLire, Teaching French by Navigating in Texts. Information Processing and Management of Uncertainty in Knowledge-based Systems, En ligne sur http://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00097849/en
Swales J. (1990). Genre analysis. English in academic and research settings, Cambridge, Cambridge University Press.

  • Vendredi 14 juin

3ième SESSION : Ecriture, réécriture et discours d’expert

9 h - 9 h 50 Le scripteur linguiste. Eléments pour l’analyse d’une écriture de spécialité

Irène Fenoglio, Institut des Textes et Manuscrits Modernes (CNRS-ENS).

L’écriture linguistique est actuellement l’objet de divers travaux (études de genres, travaux de terminologie, genèse de notions à partir d’un ensemble de textes publiés) mais aucune de ces études ne s’est attachée à l’aspect processuel du discours théorique en train de se textualiser, visible sur des manuscrits de linguistes. Comment un auteur linguiste s’y prend-il pour penser son objet, élaborer une notion, formuler son discours ? Comment travaille-t-il ? Quels sont les activités sur lesquelles se fonde sa puissance d’invention ?
Nous observerons, sur des manuscrits d’Emile Benveniste et de Ferdinand de Saussure, à travers leurs notes et brouillons, toutes les sollicitations méthodologiques par lesquelles is passent, les hésitations auxquelles il sont en proie, les calculs terminologiques et les prescriptions, voire injonctions qui en résultent en vue de la finalisation de leur discours ; discours destiné à enrichir le développement et le savoir théoriques.
Le texte publié, référable, condamne toutes ces élaborations à l’invisibilité sinon à l’inexistence alors même qu’elles construisent et explicitent le processus de théorisation. Le généticien linguiste les débusque, les analyse et, par là-même, inscrit son travail dans le mouvement d’enrichissement des connaissances visé par les textes dont il met en valeur l’avant-texte.

4ième SESSION : La problématique du lecteur

13 h 30 - 14 h 20 Les professions de l’écrit face au problème de l’adéquation.

Bertrand Labasse, Université d’Ottawa

Le centrage sur la réception étant ce qui caractérise la communication par rapport à l’expression, scolaire ou littéraire, la capacité à assurer l’adéquation d’un message à ses destinataires est le c¦ur de l’expertise communicationnelle. Mais que peut-on valablement dire une fois que l’on a proclamé qu’il fallait « écrire pour son lecteur » ? L’examen des discours et préceptes qui ont cours montre à quel point les professionnels se représentent mal leurs destinataires. Toutefois, le rapprochement des connaissances actuelles sur les processus cognitifs de la lecture et sur ses déterminants sociaux permet d’esquisser une représentation générique de l’adéquation communicationnelle (un « modèle de lecteur ») qui rende nettement mieux compte des attentes et compétences réelles de ces destinataires. Après avoir précisé les composantes et les fondements de ce modèle, on examinera les perspectives scientifiques, techniques et pédagogiques qui en découlent. En effet, la modélisation de l’adéquation sociocognitive des message, parce qu’elle se situe à l’interface de problèmes pratiques et de problématiques scientifiques, peut permettre non seulement de renforcer l’expertise des praticiens ou des étudiants et leur maîtrise de leurs stratégies discursives, mais aussi d’apporter des éclairages nouveaux sur plusieurs questions théoriques classiques.


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