Neïma expose ici ses pensées au moment de mourir. Il s’agit d’un texte à contraintes formelles pour mettre l’accent sur sa peur. Chaque strophe est composée de cinq phrases : une simple, une juxtaposée, une coordonnée, une d’une subornée et une de deux subordonnées.

Je sors de ma torpeur.
Je tremble : j’ai froid.
Je suis allongée sur le sol mais je n’ai pas la force de me lever.
Je sens l’odeur du souffre aussitôt que l’allumette est craquée.
Mon regard erre pendant que mes yeux se brouillent à cause de la fumée qui m’environne.

J’observe.
Je reconnais cet endroit : je suis dans la cage d’escalier.
Je suis frigorifiée et je sens l’humidité du lieu.
Je panique dès que je vois les flammes s’approcher.
Il semble que ce soit la nuit, à moins que ce ne soit le jour.

Je ne distingue rien.
Je ne peux m’en empêcher, je pleure.
Je m’assieds et replie mes jambes contre moi.
Je prie pour un mauvais rêve lors même que j’ai conscience de cette sinistre réalité.
Mon rythme cardiaque s’accélère tandis que ma respiration se fait haletante et que ma gorge se serre.

J’angoisse.
J’ai de l’espoir ; je suis folle.
Je déraisonne et pourtant je veux y croire.
Je supplie pour ma vie même si je sais la chose vaine.
Personne ne me viendra en aide si bien que tout espoir est anéanti une fois que j’accepte mon sort.

Je suis horrifiée.
Je suis impuissante, je ne peux rien faire.
J’ai froid, mais soudain j’ai chaud.
Je vais bien mis à part le fait que je meurs.
Quand les flammes m’atteignent, je sais alors que mon cauchemar s’achève.

Je brûle.
Je pleure, je crie.
Je ne suis plus en vie, mais je ne suis pas encore morte.
J’agonise à mesure que les flammes me dévorent.
La mort est si cruelle que je pense à toutes ces femmes qui ont été brûlées sur un bûcher.