Comme chaque jour depuis six mois j’y pense. Ma décision est prise. Je ne peux plus attendre. C’est résolu, je prends mon courage à deux mains et décide d’aller trouver M. Aubade, le chef de service, afin de lui demander une augmentation. Après tout, je travaille ici depuis longtemps. Durant ma carrière j’ai vu beaucoup de personnes ressortir heureuses de leur entretien avec le chef. Leur vœu enfin exaucé, leur vie est changée du tout au tout. Quand elles reviennent, elles rayonnent !
Moi aussi, je suis prête et moi aussi je veux connaitre la satisfaction d’être augmentée. Je le mérite. Mais pour cela je dois me libérer de mes peurs, de mes freins, de mes complexes ! J’exerce ici presque sans compter mes heures et je participe énormément au développement du service. Je suis toujours à mon poste, je veille, j’aide, j’oriente. Je suis gonflée à bloc !
Pourtant le directeur a passé sa journée à hurler sur le personnel. Alors, je me demande dans quelles dispositions il sera lors de notre entrevue. Tictac ! L’heure fatidique approche. Il est temps. J’hésite une dernière fois et finalement je m’élance, déterminée. Mes jambes tremblent et mes mains sont moites. J’arrive à présent devant le bureau du patron, je demande à son assistant de m’annoncer. Il me répond poliment de bien vouloir patienter un instant. Je vais donc m’assoir dans un confortable canapé, ce qui l’espace d’un instant diminue un peu mon anxiété. Soudain, le secrétaire me fait signe que je vais être reçue. Le moment tant attendu et tant redouté est enfin arrivé. Je me redresse, ajuste ma veste et pénètre dans le bureau. M. Aubade, le chef de service, est là devant moi souriant, calme, bienveillant.
Après les formules d’usage, je rentre dans le vif du sujet. Je parle vite, j’ai chaud, j’ai l’impression d’être confuse. En réalité mes mots claquent, vifs, nets et précis.
Je suis infirmière depuis vingt ans et aujourd’hui je viens de demander à mon chef de service, chirurgien esthétique renommé, une augmentation mammaire.
Zohra BBk