Labasse (2009), chercheur et professeur à l’Université d’Ottawa, a réalisé une étude pour caractériser l’enseignement en rédaction professionnel.
Pour cela, il réunit un corpus de cinquante manuels de rédaction anglophones et francophones issus des années 1998 à 2002. Chacun d’entre eux est analysé au travers d’un dépouillement systématique par concordance topique complété par un post-codage scalaire ou binaire. Ce dépouillement permet de condenser l’ensemble des discours des auteurs. Répartis en trois groupes : rédaction générale, rédaction journalistique et rédaction scientifique et technique, ce corpus réunit les avis de 116 personnes comme des praticiens-formateurs, des enseignants-chercheurs universitaires, des consultants privés et des cadres de communication.
A partir de ce corpus, Labasse évalue plusieurs hypothèses. Tout d’abord, il cherche à savoir si la terminologie des titres des manuels permet de définir une caractéristique commune au champ de la rédaction professionnel. Le mot Écrire est présent de nombreuses fois mais est souvent précisé par d’autre termes. À l’inverse, le terme professionnel(le) est très peu employé. Il en conclut que la rédaction professionnelle ne se présente pas comme une discipline scientifique autonome.
Puis, l’auteur continue son raisonnement et cherche à savoir comment les auteurs se placent vis-à-vis du système scolaire. Malgré le fait que la moitié des manuels proposent des indications relatives à la conjugaison et au lexique, l’auteur indique que la plupart marquent une scission face aux méthodes scolaires.
De plus, selon l’auteur, le champ de la rédaction professionnelle se définit difficilement de façon autonome. À ce titre, il indique que l’observation des filières universitaires françaises montre une dépendance de la rédaction professionnelle par rapport aux autres familles disciplinaires (linguistique et science de l’information et de la communication).
Enfin, l’auteur vérifie l’hypothèse que le champ de la rédaction professionnelle n’est pas réductible aux champs d’application des écrits. Il indique à ce sujet que dans la plupart des manuels l’expertise mise en avant par les auteurs ne permet pas de définir des caractères propres aux écrits professionnels.
À la fin de son article, Labasse remarque que l’ensemble des textes prend en compte la référence au destinataire. Il en déduit que la prise en compte de la réalité psychologique et sociale des destinataires est la caractéristique commune à l’ensemble des ouvrages. Ainsi, l’auteur l’atteste : l’objet académique de l’enseignement de la rédaction professionnelle est la prise en compte du destinataire.
L’auteur termine sa recherche en indiquant que le champ de la rédaction professionnelle ne dispose pas de paradigme consensuel pour faire admettre ce champ comme objet d’étude à part entière. Passage obligatoire de toutes les sciences en gestation, l’auteur n’omet pas la possibilité qu’un jour l’enseignement de la rédaction professionnelle puisse le devenir.
Référence électronique : Bertrand Labasse, « L’écrit professionnel : ambiguïtés et identités d’un objet académique », Pratiques [En ligne], 143-144 | 2009 mis en ligne le 19 juin 2014. URL : http://pratiques.revues.org/1476 ; DOI : 10.4000/pratiques. 1476