Pourquoi le N se change en M devant le P, le B et le M ? [1]

Dans le temps d’il y a longtemps les mots parlaient comme les hommes. Et comme les hommes il y en avait des petits et des grands, des faciles à vivre et des surprenants, des fidèles et des capricieux. Mais de se parer ils partageaient tous le goût et dans le grand Alphabet leurs atours trouvaient. Les mots frileux se couvraient d’un accent circonflexe. Les dérivés portaient pour blason un t, un d ou un s et les adjectifs arboraient un e devant les dames. Ainsi vivait le peuple des mots, en harmonie avec toutes les lettres.

Hélas un jour, trois caractères bien trempés commencèrent à dicter leur loi. Les trois trublions, du nom de P, B et M se mirent à pérorer et firent bientôt leur fief de certains termes. Les vocables habités par EN, AN, ON et IN payèrent un lourd tribut. Ils durent déposer leur n aux pieds de ces nouveaux seigneurs et adopter un m en leur présence. Forts de cette victoire, P, B et M décidèrent de conquérir l’ensemble du territoire de La Langue.

Perturbés, les mots en perdirent leur latin. Des iMdividus zélés relayèrent des CoMtre-Ordres. Tout uM ChacuM se cousit une troisième jambe et les N se mirent à céder leur place au M face à toute consonne et même pour un rien.
Seul l’espiègle petit Bonbon résista, bientôt suivi par Embonpoint, Néanmoins, Bonbonne, Bonbonnière et Néanmoins. Puis leur cran en inspira d’autres. Exaltant le souvenir de leur aïeule Orthographe des milliers de mots firent choir le jambage inutile et retrouvèrent leurs racines.

Cernés par les règles, P, B et M n’intimidèrent plus guère de mots. Seuls les premiers convertis continuèrent d’obéir au trio. Voilà pourquoi encore aujourd’hui le n se change en m devant le P, le B, et le M. En tout cas, c’est ce qu’on raconte au pays des mots. Mais peut-être connaissez-vous une autre histoire qui explique pourquoi le n est si inconstant ?