Questions au Dr Charlotte ARENDT, spécialiste de chirurgie vasculaire, CHU de Bordeaux

- Pourquoi, les moufles sont-elles plus efficaces que des gants pour se protéger du froid ?
En cas de froid, le corps humain est capable de renforcer son isolation thermique, l’hypothalamus commandant une vasoconstriction des vaisseaux à la surface de la peau qui se rétrécissent alors pour maintenir la chaleur des organes vitaux. Les pieds et les mains, extrémités pôle nord, pôle sud du corps ne sont pas des organes vitaux d’où la nécessité de les protéger sauf à s’imaginer être un manchot Adélie. Si notre animal était un homme, il préférerait les moufles, pas seulement pour des raisons pratiques liées à sa morphologie mais plutôt parce qu’à -34 degrés, mettre des gants revient à enfiler un Lycra pour plonger sous la banquise ! Mais cela relève, également de la thermodynamique.

- Thermodynamique ? Tout dépend du degré de froid ?
En partie oui. Lorsque les températures sont aussi basses que des plaques eutectiques destinées aux produits surgelés, il faut autant de couches, poils, graisse et fourrure qu’un ours polaire pour se réchauffer. La thermodynamique fait appel à une autre concept fondamental. Elle s’intéresse à des propriétés d’ensemble et non aux comportements individuels de chaque particule. Cette approche phénoménologique a permis de démontrer qu’au delà de la convection, refroidissement d’une zone chaude par une zone froide, plus la zone de contact avec le froid extérieur est grande, plus le refroidissement est grand, intense, un épisode glaciaire pour vos doigts plus rapidement transformés en stalactites dans des gants. Serrés dans leurs moufles, bien alignés telles des sardines, vos doigts risquent moins les craquements et autres écoulements liés au froid.

-Quelles sont les conséquences sur la santé ?
La chirurgie vasculaire peut témoigner d’une avalanche de pathologies imputables au froid. Troubles circulatoires, rétrécissement des vaisseaux sanguins, occlusion artérielle pour les cas les plus graves. Ces pathologies ont un effet boule de neige, se déclenchant tour à tour et nécessitant une opération, souvent. Le cas extrême est celui du syndrome de Raynaud. La main devient d’abord pâle comme un glacier, puis bleue de manque d’oxygène, un comble, et enfin lorsque la circulation sanguine est vraiment mauvaise, l’extrémité n’est plus qu’une griffe de phoque. Il faut alors opérer pour séparer les nerfs.