Phèdre, Racine

Critique littéraire
mardi 28 novembre 2023
par  Eva Lucas


Critique littéraire : Phèdre, Racine
DÉRAISONS DES PASSIONS

PHÈDRE
Puisque Vénus le veut, de ce sang déplorable
Je péris la dernière et la plus misérable.
OENONE
Aimez-vous ?
PHÈDRE
De l’amour j’ai toutes les fureurs.
Acte I, Scène 3

Phèdre est une œuvre emblématique de la tragédie classique française dont Jean Racine en est l’auteur et le maître incontesté. Mise en scène dans un contexte antique et mythologique, l’auteur en respecte parfaitement les codes dramaturgiques. Parue pour la première fois en 1677 sous le titre de Phèdre et Hyppolite, elle sera définitivement baptisée Phèdre dix ans plus tard lors de sa deuxième édition.
Issu de la noblesse et largement influencé par la religion, Racine se fera ainsi une place parmi les plus grands noms de la littérature classique, connaissant succès sur succès notamment avec La Thébaïde, Alexandre Le Grand et Andromaque. Il se rapprochera du pouvoir et du roi Louis XIV, devenant même son historiographe.

Phèdre, personnage mythologique emblématique est victime de ses propres sentiments. Mariée à Thésée, héros de maintes aventures qui est ici représenté comme un époux infidèle, avide de pouvoir et par conséquent souvent absent, elle est pourtant dévorée par l’amour incestueux et non-réciproque qu’elle éprouve pour son beau-fils Hyppolite. Le poids de cette passion secrète dangereuse la gangrène à en perdre la raison.

Les tensions amoureuses, politiques, familiales et divines s’entremêlent et la vitesse de lecture des passions et des déraisons des personnages s’accélère tel un rythme cardiaque qui s’emballe.
Les personnages sont présentés comme dénués de pouvoir face à leur situation respective bien qu’ils soient importants voir puissants par leur statut ou leur filiation. Phèdre, fille de Minos et Pasiphaé, Thésée, héro grec dont on conte mille et une aventures et victoires, ou encore Hyppolite, fils de ce dernier et de la reine des Amazones sont pourtant tous à la merci de leurs sentiments et de leurs pulsions. Aucun ne saura déroger à celles-ci et tous s’en remettent aux divinités comme étant à la fois les responsables et les exutoires de leurs malheurs.
La vision transmise est fataliste : court à sa perte celui qui déraisonne par amour ; court à sa perte celui qui raisonne par passion.
La première fraction peut dépeindre Hyppolite qui, par amour pour son père, ne révèlera pas ce qu’il sait mais en paiera le prix. La seconde dépeint Phèdre, qui ne sait obéir à autre chose qu’à la passion qui la consume.
Phèdre l’héroïne permet une catharsis éternelle pour chaque lecteur par l’analyse que l’on fait des sentiments amoureux et de ce qui en découle : crainte, pitié, peur, jugement, folie, mort, ...
La passion est destructrice pour soi-même et pour qui s’en approche trop et ne saurait être un sujet obsolète dans toute société. En cela, l’œuvre recense dans la profondeur les émotions et leurs fatales conséquences, amenant chacun à se questionner et à réfléchir sur la légitimité et la raison de ce qui constitue le premier mobile des passions : l’amour.


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