Le cousinage entre la France et le Québec est apparent dans beaucoup de domaines. La langue bien sûr est un premier lien visible, très fort ; l’histoire ensuite, d’abord la Nouvelle-France et l’immigration française qui a peuplé le continent nord-américain, puis la décision de Louis XV qui n’a peut-être pas fait le meilleur choix en préférant les Antilles aux contrées nordiques qui deviendront le Québec ; enfin l’amitié et la bienveillance dont nous profitons quand les Québécois rencontrés entendent notre accent si particulier.
Dans les pages du Devoir, nous pouvons aussi sentir ce lien : la politique française y est commentée avec acuité mais sans la retenue que les journalistes français observent souvent sous prétexte déontologique. Ainsi, le 14 janvier, un papier de Christian Rioux parlait de « guerre » annoncée dans la campagne présidentielle. Le correspondant du Devoir à Paris ne pratique guère l’euphémisme ; il traitait les réformes actuelles et les sorties du gouvernement comme les actes de campagne d’un Sarkozy dans le rôle d’hyperprésident que nous lui connaissons déjà. Rioux prenait l’exemple du recul sur la TVA sociale (le sigle est non explicité) et de la mise en avant de la taxe Tobin déjà adoptée en France en 2002, mais dont « personne ne se souvenait », ajoutait-il sarcastiquement.
Le 18 janvier, dans la page Éditorial, Serge Truffaut publiait un court papier à propos de la perte du fameux triple A et des réactions de Nicolas Sarkozy dans ce dossier. Avec le même aplomb qu’un Jean-Michel Aphatie ou qu’un Alain Duhamel, Truffaut analysait la stratégie du président français avant la décote de Standard and Poor’s comme une erreur stratégique pour le candidat Sarkozy. En effet, ses promesses de tout mettre en œuvre pour éviter la perte d’un A ont pénalisé sa future campagne contre Hollande et les autres. L’opinion publique ne pouvait que se retourner contre le président, après qu’il se soit vainement« agité ». Le plan d’austérité, qui avait été annoncé, a bien fait rire notre éditorialiste. Souvenez-vous, il s’agissait des taxes sur les sodas et les entrées de parcs d’attraction.
En conclusion, Truffaut voyait dans l’impassibilité d’Obama, pareillement menacé, l’attitude à adopter. Sarkozy ne doit donc pas s’étonner d’être au plus bas dans les sondages aujourd’hui. Le papier se terminait par un sondage, donnant Hollande vainqueur à 68% contre 32% pour le représentant de l’UMP, et par cette phrase : « le président a joué avec brio la scène de l’arroseur arrosé. »
Rédigé par Laurent Falquet
Sources : A cent jours du scrutin - Sarkozy tire sur tout ce qui bouge ; La décote de la France - L’arroseur arrosé